Le moteur 1.5 BlueHDi de Stellantis fait couler beaucoup d’encre depuis quelques années. Ce bloc diesel moderne, lancé en 2017 pour remplacer le 1.6 HDI, équipe de nombreux modèles à succès comme les Peugeot 208, 2008, Citroën C4 ou Opel Corsa. Mais derrière cette large diffusion se cache une réalité plus sombre : des problèmes de fiabilité récurrents qui ont poussé le constructeur à lancer un rappel massif de près d’un million de véhicules en Europe. Entre promesses technologiques et défaillances mécaniques, ce moteur cristallise les interrogations sur la qualité des motorisations diesel modernes.
Le 1.5 BlueHDi, désigné par le nom de code DV5, représente l’aboutissement du savoir-faire diesel de Stellantis. Ce bloc aluminium avec chemises en fonte se décline en plusieurs puissances allant de 75 à 130 chevaux. Son architecture repose sur un double arbre à cames en tête, une injection directe common rail fonctionnant jusqu’à 2000 bars et un turbocompresseur à géométrie variable.
La particularité technique majeure réside dans sa chaîne de distribution reliant les deux arbres à cames, protégée par un carter étanche. Cette solution promettait une durée de vie accrue par rapport aux systèmes classiques. Le moteur intègre également un système AdBlue pour respecter les normes Euro 6, ainsi qu’un double circuit EGR censé limiter l’encrassement.
Une diffusion massive dans la gamme Stellantis
Plus de 36 modèles différents ont reçu ce moteur depuis son lancement, touchant six marques du groupe et même Toyota pour ses utilitaires. Cette ubiquité explique l’ampleur des problèmes rencontrés et l’impact médiatique du rappel. Les véhicules concernés couvrent une période de production s’étendant d’octobre 2017 à janvier 2023.
Les défaillances majeures du 1.5 BlueHDi
Plusieurs problèmes de fiabilité affectent ce moteur, particulièrement sur les versions produites avant 2023. Ces défauts peuvent transformer l’expérience de conduite en véritable cauchemar pour les propriétaires.
La chaîne de distribution : un talon d’Achille
Le défaut le plus grave concerne la chaîne reliant les deux arbres à cames. D’une largeur insuffisante de 7 mm sur les premiers modèles, elle s’use prématurément et peut casser entre 30 000 et 120 000 km. Cette usure précoce est fortement influencée par la qualité de l’huile moteur, en particulier l’accumulation de suie qui agit comme un abrasif.
Les symptômes incluent des bruits de claquement ou de cigale au démarrage, une consommation d’huile excessive et des vibrations anormales. La rupture entraîne des dégâts catastrophiques : soupapes tordues, pistons endommagés, voire destruction complète du bloc moteur. Les coûts de réparation peuvent atteindre 8 000 euros, souvent non pris en charge en garantie.
Problèmes du système AdBlue
Le système d’injection d’urée génère fréquemment des codes défaut, allumant le voyant moteur et empêchant le passage au contrôle technique. Les capteurs de pression défaillants multiplient les messages d’erreur, créant un stress constant chez les propriétaires. Le réservoir d’urée peut cristalliser en cas d’utilisation irrégulière, nécessitant un nettoyage complet du circuit.
Autres dysfonctionnements récurrents
La vanne EGR s’encrasse rapidement en usage urbain, malgré le double circuit censé limiter ce phénomène. Le turbocompresseur à géométrie variable présente une usure prématurée du mécanisme de variation, provoquant des pertes de puissance. Le filtre à particules se colmate fréquemment sur les trajets courts, nécessitant des régénérations forcées coûteuses.
La réponse de Stellantis : rappels et mesures correctives
Face à l’ampleur du problème, le groupe Stellantis a finalement réagi avec des mesures concrètes depuis juillet 2025.
Un rappel massif organisé par vagues
Stellantis a mis en place un rappel de 636 000 véhicules en France et 930 000 en Europe. Les modèles concernés font l’objet d’un diagnostic audio via une application spéciale qui analyse les bruits du moteur pour détecter l’usure de la chaîne. Si un problème est identifié, le remplacement est effectué gratuitement avec une nouvelle chaîne renforcée de 8 mm.
Cette campagne est organisée par vagues pour assurer un traitement efficace, en donnant la priorité aux véhicules les plus anciens qui présentent un risque plus élevé.
Extension de garantie et remboursements
Le constructeur propose une prise en charge totale des réparations initialement limitée à 5 ans ou 150 000 km. Depuis juillet 2025, cette couverture s’étend progressivement jusqu’à 10 ans ou 240 000 km pour les moteurs concernés. Les clients ayant payé des réparations entre janvier 2023 et juin 2025 peuvent demander un remboursement via la plateforme stellantis-support.com.
Solutions techniques mises en œuvre
Tous les véhicules concernés reçoivent une mise à jour logicielle pour optimiser la pression d’huile et limiter l’usure. L’huile moteur est remplacée par une huile répondant à la norme FPW9.55535/03, plus visqueuse et dotée d’additifs anti-usure. Depuis février 2023, une nouvelle chaîne de 8 mm plus résistante équipe les moteurs en production.
Comment éviter les problèmes sur votre 1.5 BlueHDi ?
Plusieurs mesures préventives peuvent limiter les risques de panne sur ce moteur capricieux.
L’importance cruciale de l’huile moteur
Pour les véhicules produits avant février 2023, utilisez exclusivement une huile 5W-30 répondant à la norme Stellantis FPW9.55535/03. Les modèles postérieurs nécessitent une huile B71 2010 SAE 0W-20. Des vidanges tous les 10 000 km maximum sont recommandées au lieu des 20 000 km préconisés, particulièrement en usage urbain.
Entretien du système AdBlue
Utilisez uniquement de l’urée certifiée ISO 22241 pour éviter la cristallisation. Complétez le réservoir régulièrement sans attendre l’alerte. Un nettoyage préventif du système tous les 40 000 km chez un spécialiste élimine les dépôts avant qu’ils n’endommagent les injecteurs d’urée.
Conduite adaptée
Laissez chauffer le bloc avant de solliciter le turbo, particulièrement par temps froid. Effectuez régulièrement des trajets autoroutiers d’au moins 30 minutes pour permettre la régénération du FAP. Évitez les accélérations brutales à froid qui sollicitent excessivement la chaîne encore mal lubrifiée.
Signes avant-coureurs à surveiller impérativement
Certains symptômes doivent vous alerter immédiatement sur l’état de votre moteur 1.5 BlueHDi.
Un bruit de claquement au démarrage à froid indique souvent un problème de chaîne naissant. Des vibrations inhabituelles ou une baisse de puissance signalent un dysfonctionnement possible. Une consommation d’huile supérieure à 0,5 litre aux 1000 km nécessite un diagnostic urgent.
L’allumage répété du voyant moteur, même temporaire, ne doit jamais être ignoré. Des fumées blanches ou bleues excessives révèlent des problèmes d’injection ou de segmentation. Au moindre doute, consultez rapidement un professionnel pour éviter l’aggravation des dommages.
Alternatives et recommandations d’achat
Si vous recherchez un diesel fiable chez Stellantis, le 2.0 BlueHDi reste une valeur plus sûre avec moins de problèmes recensés. Chez la concurrence, le 1.6 dCi de Renault présente une meilleure fiabilité globale malgré quelques soucis d’injecteurs. Le 2.0 TDI du groupe Volkswagen reste une référence en termes de longévité.
Pour ceux prêts à changer de technologie, les hybrides Toyota offrent une fiabilité exemplaire. Si votre usage reste principalement urbain, l’électrique devient une alternative crédible qui élimine totalement les problèmes mécaniques traditionnels.
Verdict : un moteur sous surveillance étroite
Le moteur 1.5 BlueHDi illustre parfaitement les dérives de la course à la complexité dans l’automobile moderne. Malgré les corrections apportées depuis 2023 et les mesures de rattrapage de Stellantis, ce bloc reste entaché par ses défauts de jeunesse. Les propriétaires actuels doivent maintenir une vigilance accrue et respecter scrupuleusement les préconisations d’entretien.
Pour les futurs acheteurs, ce moteur nécessite une réflexion approfondie. En occasion, exigez un historique d’entretien complet et vérifiez l’éligibilité aux rappels. En neuf, les versions post-2023 semblent plus fiables, mais le recul manque encore pour confirmer la résolution définitive de tous les problèmes. La prudence reste de mise face à ce moteur qui a ébranlé la confiance des automobilistes envers la marque française.